la Compagnie

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Wednesday, October 3, 2012

De la chaire (et l'incarnation).

Que l'on se rassure: il ne sera plus question ici de mon pied (oui, oui, il va très bien, c'est gentil; la guérison et la convalescence sont en bons trains, merci).
Car, à mesure qu'approche la première des Lectures saintes, celle des Confessions de Saint Augustin (oui, toujours le 21 octobre prochain à Sainte-Clotilde, ne vous inquiétez pas), nos sujets se doivent naturellement d'être moins frivoles, tandis que le travail devient plus intense encore.
Et, les jours passant avec les filages, une chose devenait de plus en plus certaine: si les passages de récit (la perte de l'ami intime, par exemple, ou le départ pour Rome) étaient clairs, ceux, plus édifiants, des réflexions ou des harangues du saint, l'étaient un peu moins, n'avaient pas la même force que le reste. 
Et pour cause, quand je répète, je suis au niveau du sol, mon pupitre devant moi.
Alors que, lors des présentations, à l'instar de Bérulle évoquant le Verbe incarné à l'Oratoire de la rue Saint-Honoré, je serai en chaire.
Or (oui, c'est étonnant), les laboratoires de la Compagnie n'en sont pas encore équipés, ce qui est bien ennuyeux, car je sais que cela va changer énormément de choses — corporellement, vocalement, dans le rapport que j'aurai avec l'assistance, et dans celui que je devrai avoir avec l'incarnation du texte. Ce qui est d'autant plus ennuyeux que, si nous avons la chance de pouvoir répéter une fois à Sainte-Clotilde avant le 21 octobre, ce n'est qu'une fois, et certains de ces problèmes devront être résolus avant.
C'est pourquoi je décide aujourd'hui de recréer dans nos laboratoires une chaire de bric et de broc: quatre chaises à hauts dossiers, accolées, pour m'élever un peu plus, et pour m'encadrer dans la cuve. Certes, sans l'abat-voix, mais je n'en aurai de toute façon un qu'à Saint-Roch, puisque la chapelle de Jésus Enfant est suffisamment intime pour s'en pouvoir passer.
Ce serait un peu trop dire que cela change tout, mais tout de même. Il me semble qu'à cette nouvelle hauteur, je retrouve l'énergie et l'équilibre qui me faisaient si cruellement défaut auparavant, et je dois revoir certains détails de ma gestuelle: les envisager passant par dessus l'encorbellement, plus en avant, les penser en les dirigeant plus en direction de l'assistance, dont la position est fatalement modifiée. 
Certains gestes deviennent plus amples, plus fermes, sont plus habités, incarnés; la voix s'élève plus à certains moments qui trouvent ainsi la puissance qui manquaient à la harangue, pour tâcher de mieux happer, d'attirer au texte, par ce placement justement conçu pour de telles fins édifiantes. 
Sans parler du regard, qui doit changer radicalement puisqu'auparavant, j'étais au même niveau que mon assistance imaginaire, je pouvais le garder droit. Maintenant, impossible, évidemment: je dois le descendre, l'abaisser vers le sol, si je veux parvenir à élever celui de la foule avec moi.
Et c'est toute une perception de mon corps, et aussi toute une habitude, tant de ma choréographie gestuelle que du placement de ma voix, qui se trouvent changées, et c'est très intéressant — sans doute va-ce le devenir plus encore à mesure que je m'y sens plus à l'aise, au fil du peu de semaines qui me séparent encore de la première, et au cours desquelles j'expérimenterai aussi dans une vraie chaire, ce qui ne pourra être que plus différent et étrange encore — et d'autant plus enrichissant!
Charles.

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