la Compagnie

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Sunday, May 31, 2015

Du trait à la couleur.

Tout costume commence par un trait. D'abord un trait de crayon sur le papier, pour le dessiner, le façonner une première fois en donnant l'allure générale au personnage. Un trait en noir et blanc, suivi par d'autres, croisés par d'autres encore, détaillant les matières, les plis, le tombé de chacun des éléments, encadrant le dessin final de consignes et de points importants. Des lignes, comme lorsqu'un peintre prévoit son tableau, dispose ses personnages dans l'espace, leurs regards, la lumière.
La saison prochaine, notre dixième, nous montons un projet un peu fou: Les Plaideurs de Jean Racine, sa seule comédie. Devant l'ampleur du décor et le nombre des costumes à réaliser pour cette nouvelle production, nous avons lancé une campagne Ulule pour les financer. Et l'élan qui a été témoigné à cette campagne est jusqu'à présent exceptionnel et impressionnant. Quelques uns de nos soutiens ayant choisi de nous aider en nous envoyant un chèque (car, oui, vous pouvez également nous envoyer vos contributions par chèque à l'ordre de la Compagnie Oghma si vous préférez et elle sera portée à la cagnotte! — écrivez-nous pour que nous vous transmettrons notre adresse postale), nous avons d'ores et déjà pu investir dans une partie des tissus des costumes et j'ai ainsi pu me lancer dans la confection de l'un d'entre eux: le pourpoint de soie céladon que portera Léandre,(oui: nouvelle pièce, nouvelle production, mais encore un Léandre, dont Elsa sera encore amoureuse — cette répétition m'amuse beaucoup!).



Mais revenons à nos traits. Car d'autres suivent les premiers au crayon: sur du tissu cette fois-ci, tandis que l'on reste dans une anticipation des matières, des couleurs: on trace à la craie les lignes de coupe, les coutures sur la toile à patron. Avant de l'assembler dans ce qui sera en quelque sorte le brouillon du costume. A ce stade, le rendu final ne se reflette que dans mon imagination, et il sefaut  projeter dans les couleurs et les matières pour avoir une idée de ce à quoi ressemblera la chose finie.

Essayages, retouches. A nouveau des lignes: celles du corps de l'acteur auxquelles j'ai tâché d'adapter mon patron, celles du tissu qui, si besoin est avec quelques épingles, épousent celles de l'acteur.
Puis on découd, on trace d'autres traits. C'est prêt: c'est cette fois-ci dans le tissu définitif. Tissu définitif choisi avec soin, parfois après plusieurs heures passées à chercher la bonne couleur dans la bonne matière (les couleurs baroques n'étant plus tant celles qui sont à la mode, il m'aura par exemple fallu près de trois heures pour trouver la couleur parfaite de la doublure plus claire du pourpoint)
Et là le miracle commence à opérer, le costume semble prendre une nouvelle vie: celle qu'on lui a toujours imaginée, celle qu'on a rêvée. D'un monde en noir et blanc, un peu raide, on plonge dans la chatoyance baroque. C'est un peu comme si, après l'avoir toujours vue dans une copie en noir et blanc, on redécouvrait la grande scène du bal colorée du Fantôme de l'Opéra de Rupert Julian avec Lon Chaney: la magie nous happe et l'on n'a plus la même chose devant les yeux. On passe des lignes brutes et un peu raides gravées dans le bois à l'ukiyo-e finie, les couches de couleurs ayant peu à peu imprimé le papier de riz. Un monde de couleurs, de reflets, de matières, que l'on n'imaginait déjà presque plus: on est passé du trait à la couleur.


Si ce ne sont encore que des épingles qui tiennent assemblées manches et basque sur notre mannequin Ferdinand, déjà je découvre, les yeux pétillants d'étoiles émerveillées, le spectacle prendre un peu vie et nous voilà repartis en voyage vers le dix-septième siècle!
Si nous sommes suffisamment proches de l'objectif de notre campagne pour nous lancer dans de telles expéditions, nous n'y sommes pas encore et ainsi, pour multiplier ces yeux enthousiasmés et emportés par nos costumes (sans oublier notre décor), continuez à nous soutenir (par chèque aussi donc, si vous le souhaitez): chaque euro compte, nous importe et nous fait chaud au cœur. N'oublions pas que nous ne pourrons bénéficier de votre soutien hors-normes que si la somme finale (ou plus) est récoltée. N'hésitez donc plus: le soutien qui nous a été montré jusqu'ici est formidable, tout comme nous espérons que le seront nos costumes et décor
Parlez-en aussi avec force autour de vous, Facebook, Twitter et alli sont aussi d'excellents relais: plus l'aide qui nous est apportée sera grande, plus les constellations d'émerveillement se répandront, d'abord dans nos studios, mais surtout à partir de février lorsque nous aurons la joie de vous présenter le spectacle!
Charles.