Après une première répétition publique de
notre prochain spectacle sur les sonnets de Shake-speare, Magister artium
noster, Charles, en redonne une autre le quinze décembre. Voici ce qu'il en
ressort, de quatre yeux attentifs et vigilants, dont deux qui ont déjà narré cette
aventure formidable:
Nous y revoilà.
Cette fois bougies, costume et maquillage
sont là pour nous donner l'ambiance.
Le travail accompli depuis le 24 novembre est remarquable.
Le programme, clairement inscrit sur une
feuille qui nous a été distribuée, a trouvé son équilibre.
La diction des poêmes en français est
claire, les jeux de regard, soulignés par le maquillage shake-spearien et
baroque, convaincants, et le ralenti des mouvements en accord avec l'atmosphère
générale.
Seuls pèchent encore l'occupation de
l'espace, ou plutôt les déplacements encore par trop linéaires.
Mais le spectacle est déjà là et nous avons
hâte de le voir au théâtre.
Christine, notre éternelle et bien-aimée Berma.
Loin du froid de décembre, c’est au cœur
des locaux parisiens de la Compagnie Oghma, tapis dans la crépusculaire, mais néanmoins
chaleureuse et intime lueur des bougies, que débute la seconde répétition publique
du prochain spectacle de la Compagnie, sur les Sonnets de William Shake-speare,
To.The.Onlie.Begetter.
Rompant le silence paisible qui règne dans
la pièce, un premier air de luth fait déjà entendre au spectateur ce qu’il lui
sera dit plus tard, sans que les mots ne soient nécessaires. De confidence en
confidence, Shake-speare lui-même nous apparaît, parfois à genoux sur le sol,
s’adressant directement à celui qu’il aime et qu’il souffre de trop aimer.
L’expression d’un amour malheureusement non
rendu transporte alors chacun dans son jardin secret.
A différentes échelles, les mots prononcés
ont, en effet, un écho par trop familier. Au fil des sonnets, on se laisse
apprivoiser, tandis que le texte nous berce doucement jusqu’à notre passé,
notre présent, notre intimité. La distance qui nous sépare de la scène devient
alors de plus en plus infime.
Du français à l’anglais, l’amour n’a plus
de langue, il se fait comprendre sans peine. Cependant, le calme a cessé : les
paroles se font moins tendres, l’agitation et la colère sont palpables, la
vérité sort enfin de son lit. Après une dernière et douloureuse déclaration,
l’acteur quitte la scène.
Le spectateur demeure alors quelques
instants encore dans la salle, auprès des bougies, en silence, se demandant qui
est celui dont l'histoire vient d'être racontée : celle de Shakespeare? celle
de l'acteur, c'est-à-dire de Charles lui-même? Ou bien tout simplement la
sienne propre?
Annabelle, œil juridiquement bienveillant.
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