C'est toujours au moment où s'achève un projet qu'on comprend enfin véritablement ce qu'on a voulu faire en le lançant.
Au théâtre, irrémédiablement, c'est après la dernière, et même si, au cours des représentations on a souvent procédé, par petites touches occasionnelles, à quelques modifications, c'est trop tard! — et c'est un peu pour ça que l'on se lance dans un autre projet derrière!
Au cinéma, à mesure que le tournage s'éloigne et qu'on prend du recul, les choses se révèlent à leur tour progressivement. En revoyant les chutes, en choisissant les prises &c. Et c'est justement à ce moment-là que le montage intervient.
Donc, sur le billard, et si le travail a été bien fait au moment des prises de vues, des éléments prennent une dimension qu'on n'aurait pu leur soupçonner dans le feu de l'action.
Il y a au milieu de Lord Arthur Savile's Crime, une série de séquences où notre héros est légèrement bouleversé par une nouvelle qu'il vient d'apprendre. Lors de leur photographie, j'avais filmé des plans qui n'étaient pas prévus par le storyboard minutieux, des plans plus serrés, des gros plans (avec la machine, naturellement)…
Hé bien, à mesure que nous montons, je me rends compte que cette série de séquences doit faire véritablement basculer le film jusqu'alors réaliste comme le Stroheim le plus aigu, dans le plus pur expressionnisme, subjectivant la réalité le temps de ces quelques séquences-ci. Et naturellement, les gros plans filmés au feeling, s'avèrent essentiels, et Quentin et moi avons tendance à les utiliser prioritairement — comme dans la première de la série, qui devait être un long travelling arrière en plan américain d'Arthur, où j'avais pensé insérer un gros plan à un court moment, qui devient tout à fait l'inverse, commençant sur le gros plan et se permettant un court passage de plan plus large!
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